ASSIS, DEBOUT OU COUCHES ?
ASSIS, DEBOUT OU COUCHES ?
Par Hakim Laâlam
Email : laalamh@yahoo.fr
«Palais de la culture. Découverte d’une ancienne bombe, datant de
l’époque démocratique. Selon les artificiers, elle ne présente plus
aucun danger.»
Ouf !
J’ai un mal de dos terrible ! Une douleur atroce dont je connais,
heureusement, l’origine. Cette douleur s’est faite encore plus
lancinante lorsque j’ai entendu Abdekka dire à une blessée des derniers
attentats d’Alger «il faut que le peuple reste debout !». Ma douleur au
dos et aux membres s’est accrue lorsqu’il a rajouté : «Il faut que le
peuple marche ! » C’est qu’avec ce genre d’ordres et de contre-ordres,
le squelette humain qui n’est fait que d’os souffre et encaisse
durement. Un coup, on nous demande de faire face debout au terrorisme.
Là, nous, citoyens disciplinés et épris de notre pays, nous nous
redressons, nous levons la tête, le menton fier et nous nous postons
debout, la poitrine en avant, prêts à affronter les monstres barbus.
Quelque temps après, lorsque, dans un meeting pour une présidentielle,
l’un d’entre nous se lève dans la salle et ose, en station debout, se
poser des questions sur la rahma et la main tendue aux tangos, le
candidat président lui lance : «Assis.» En bon citoyen discipliné et
épris de son Président, il se rassoit et nous avec. Quelque temps
après, le candidat président redevient président à part entière et
relâche 3000 terroristes. Là, on nous demande à nous tous qui
considérons cela comme une offense et une trahison de nous calmer,
mieux, on nous ordonne de «nous coucher» sur le passage des nouveaux
héros sortant de prison. Et depuis mercredi dernier, le même qui nous
ordonne de manière cyclique et aléatoire de nous lever, de nous
asseoir, de nous coucher est revenu nous chuchoter aux oreilles encore
endolories par la double explosion : «Maintenant, debout et marchez !»
Je veux bien être un citoyen discipliné et épris de son pays, mais ça
commence à faire beaucoup pour mon pauvre squelette. Un peu de rahma
pour un peuple de polytraumatisés que l’on n’arrête pas de maltraiter,
"orthopédiquement" s’entend, bien sûr. Je fume du thé et je reste
éveillé, le cauchemar continue.
H. L. in LE SOIR D'ALGERIE.